Le combat de la Brossinière 1793

Le combat de la Brossinière

18 juin 1793

 

L’Affaire de la Brossinière est une escarmouche qui a eut lieu le 18 juin 1793. Après avoir désarmé les partisans républicains du Bourgneuf, Jean Chouan, ses frères et ses chouans accompagnés des frères Pinçon, gagnent les landes du Saudre et de la Brossinière (ou Brécinière) et y interceptent huit soldats républicains qui rentrent de Nantes et vont vers Ernée. Ils en tuent un, en blessent un autre et font deux prisonniers.

La trentaine de Chouans tente deux expéditions, l'une au Bourgneuf où, dans la matinée, ils rudoient le maire, les officiers municipaux et tous les citoyens favorables à la République afin de les désarmer et de s'emparer de leurs armes. Une autre mission capitale les attend : ils doivent se diriger vers Bréal pour en chasser le curé intrus François Le Roy et récupérer des fusils destinés à armer une garde nationale.

Vers deux heures de l'après-midi, ils se trouvent au niveau de la Brossinière et entrent chez le laboureur-cabaretier François Baron, où ils se désaltèrent. Ils ont pris soin de laisser une sentinelle à la porte. Tout à coup, celle-ci se met à crier : "Aux armes !" Elle a vu, montant du chemin gravelais, des habits bleus. Tout le monde se disperse dans la lande avant de s'apercevoir que les soldats ne sont que huit. Ils font partie du 3eme bataillon de la Mayenne, et rentrent chez eux après avoir déserté.

Michel Le Royer, Michel Hardy, tous les deux chapeliers, Jean Védis, coutelier, Michel Robert, tanneur, Guillaume Gontier, maçon, Jean Poirier, Michel Letourneux, cordonnier, habitent tous Ernée. François Trideau est de Juvigné. Voyant les Chouans bien plus nombreux qu'eux, ils tentent de s'enfuir, les uns vers la Gravelle, d'autres vers le Bourgneuf. Dans la fusillade, Jean Poirier dit La Fleur est abattu. Michel Le Royer, Jean Védis et Michel Hardy n'échappent pas aux Chouans qui les font prisonniers. Le cadavre de La Fleur est amené chez la veuve Buron et les trois volontaires sont invités, moyennant quelques menaces à prier pour le repos de l’âme de leur camarade abattu.

Jean et François Cottereau, Julien Pinçon, et Julien Duperray font partie de la bande des oiseaux présents ce jour-là. Les frères Cottereau exigent que le cadavre du soldat abattu soit inhumé au cimetière de Bourgon. On trouve une charrette et deux chevaux chez un particulier et on y charge le cadavre, derrière lequel doivent marcher les trois prisonniers. Au bourg, on met à contribution un pataud, François Pouillard.

Les Chouans sont très embarrassés de leurs trois prisonniers, dont l'un porte un uniforme maintenant en charpie, et qui craignent pour leur vie. L'un d'eux mentionne le nom de Barthélémy Le Rétrif, « sieur de la forge », ancien procureur syndic de Bourgon, marchand demeurant à Courboray. Une chance pour eux car le vieil homme est un oncle par alliance des Cottereau. Celui-ci les détermine à laisser partir les trois soldats républicains, bien que Jean Védis, dont le père à acheté des biens ayant appartenu à un noble d'Ernée, ne soit pas vraiment un "gars bien" à leurs yeux.

Ces négociations se poursuivant, Julien Pinçon et ses hommes ne trouvent aucun intérêt à regarder le fossoyeur creuser la tombe. Ils en profitent pour enlever les armes chez Jeanne Marie Oger, dame de Martinet, veuve du notaire Paul Bodin et s'en prennent également au maire, Jean Sauvé, à qui ils prennent de force un pistolet, le second n'ayant aucun intérêt car gravé à son nom. Le maire réussit à s'enfuir vers Vitré, abandonnant ses biens… et sa femme. Le lendemain, 19 juin, il enverra sa lettre de démission au directoire d'Ernée, souhaitant se retirer et demeurer à Vitré.

François Pouillard a fini de creuser la tombe et Laurent Blin, le pataud aubergiste, lui aussi, est mis en demeure de fournir une planche sur lequel est déposé le cadavre de La Fleur, tandis que sa femme, Jeanne Coutard, doit assister à l'inhumation pour la convaincre de ce qui l'attend si elle avait le malheur de trop parler.

Les trois prisonniers poursuivent leur chemin vers Juvigné et Ernée et la bande des Chouans se disperse dans les environs de Bourgon. Le lendemain, ils se dirigent vers Bréal pour en chasser le curé intrus et se saisir des armes.

Le 19 juin, les membres du Directoire d'Ernée envoient au Directoire départemental un courrier, et le lendemain, 20 juin, les gardes nationaux d'Ernée investissent le bourg de Bourgon, et déterrent le cadavre de La Fleur "pour en faire l'ouverture" !

 

 

 

(Source : Chouans et Contre-chouans, Ernest Laurain Laval, Édition des Arts Réunis, 1928)